Récupérer l’eau de pluie qui ruisselle sur le toit de sa maison pour son usage domestique ; cette idée qui il y a vingt ans en aurait fait rire plus d’un en France est aujourd’hui a contrario plébiscitée par un nombre croissant d’entre nous. Un simple coup d’œil sur les jardins d’un lotissement quelconque et vous constaterez sans doute que printemps après printemps les récupérateurs d’eau de pluie extérieurs se font de plus en plus nombreux. Effet de mode ou fait social ?
Si on considère que la facture d’eau potable est chaque année un peu plus salée nous pencherons plus sur un phénomène durable. A défaut de chiffres fiables au sujet de l’usage de l’eau de pluie en France, nous savons selon l’INSEE que le prix de l’eau a augmenté de 40% entre 1995 et 2005, et cette hausse n’a pas faibli les années suivantes ! Eh oui, force est de constater que le verre d’eau du robinet est de plus en plus difficile à avaler tant la pression sur le porte-monnaie est de plus en plus forte !
Conclusion tirée, la récupération de l’eau de pluie apparaît donc comme une réponse concrète au problème posé par la cherté de l’eau, mais aussi comme un remède partiel à l’épuisement des nappes phréatiques et cours d’eau souterrains.
Car le problème pour notre planète est bien là
Rien qu’en France la consommation d’eau par habitant ne cesse d’augmenter depuis les années 70 pour aujourd’hui se situer à 150 litres par personne ! Bien entendu personne n’a besoin de 150 litres d’eau potable par jour ! Sur cette quantité un grand 39% est utilisé pour les douches et bains, 20% pour la chasse d’eau, 12% pour les lessives, 12% également pour l’arrosage et le lavage des voitures, 10% pour la vaisselle, 6% pour la cuisine… et 1% seulement est consommé en tant que boisson ! Ces chiffres nous montrent donc combien notre consommation d’eau potable est abusive puisque la majorité de nos besoins en eau pourrait tout simplement être satisfait par de l’eau non potable, comme les eaux pluviales par exemple. Or endiguer cette sur-utilisation de l’eau potable devient de plus en plus pressante alors que nous puisons actuellement sur les nappes phréatiques et cours d’eau souterrains plus qu’ils ne se régénèrent naturellement.
La récupération de l’eau de pluie, une alternative encouragée
C’est une des raisons pour lesquelles en Belgique par exemple, tout projet de construction doit obligatoirement prévoir un système de récupération d’eau de pluie pour être autorisé !
De notre côté, l’Etat français mise plus sur la carotte que sur le bâton. S’équiper d’un système de récupération d’eau de pluie est un bon moyen non seulement de réduire sa facture d’eau, d’environ un tiers, mais aussi de payer moins d’impôt. En effet, l’installation d’un tel système chez vous donne droit à un crédit d’impôt représentant 25% du prix de l’équipement hors main-d’œuvre ! Cette décote est plafonnée à 8000 euros pour une personne seule, 16000 euros pour un couple marié et 400 euros par enfant. Généreux si on considère qu’un tel système coûte entre 1500€ et 8000€ !
S’équiper d’un récupérateur d’eau est donc une aubaine qui vous donne droit à un crédit d’impôt, vous permet de réduire de manière significative votre facture d’eau et en plus vous permet d’agir pour l’environnement ! Mais attention il faut bien connaître vos droits et devoirs afin de ne pas commettre de grossières erreurs.
Quelle installation ?
Pour pouvoir utiliser l’eau de pluie il faut faire installer une citerne raccordée à votre gouttière. Externe, si vous souhaitez utiliser cette eau pour le jardin uniquement, enterrée, si au contraire vous en souhaitez en faire un usage plus large. En effet mettre la citerne sous terre permettra de réduire sensiblement la prolifération des microbes de l’eau stagnante en l’abritant de la lumière. Par la même occasion, vous éviterez le gel et pourrez utiliser l’eau de votre citerne toute l’année . Pour les cuves enterrées et si vous comptez utiliser cette eau de pluie pour un usage domestique, le professionnel installera également un filtre et une pompe afin de relier cette eau à votre maison.
Bien entendu le réseau d’eau potable et celui d’eau de pluie doivent bien rester distincts afin d’éviter tout problème sanitaire. Il vous suffit juste ensuite en tant que particulier de signaler cette installation à votre mairie afin de pouvoir déverser vos eaux pluviales usées dans le système d’épuration standard.
Mais au fait, est-il dangereux d’utiliser l’eau de pluie pour un usage domestique ? Et pourquoi devons déclarer nos installations en mairie ?
C’est bien là l’enjeu du débat depuis la prise de position de la Direction Générale de la Santé plus ou moins contre l’utilisation des eaux de pluies pour les lave-linges. Rappelons au passage qu’un système de récupération d’eau de pluie n’est pas un purificateur d’eau. A moins d’un équipement spécifique l’eau récupérée n’est pas potable. C’est ainsi que dans un phrasé et un ensemble de textes assez flous la loi française autorise l’usage de l’eau non potable pour l’arrosage, le nettoyage des sols, les WC, la machine à laver et le lave-linge. Au contraire, pour les éviers, les lavabos, la cuisine, la douche et le bain il est essentiel est obligatoire de garder l’alimentation en eau potable. On peut donc dire que judicieusement la loi autorise l’eau non potable, (et donc l’eau de pluie), pour tout usage non alimentaire et ne pouvant être ingéré.
La volonté de la DGS de mettre son véto à l’utilisation des eaux pluviales pour les lave-linges peut donc être interprétée comme une volonté plus large de restreindre l’usage des eaux pluviales. Au moment où un nombre toujours croissant de français cherchent à réduire le plus possible leur facture d’eau ne serions-nous pas en train d’essayer de marchandiser encore plus l’eau ? De mettre en place un cadre législatif afin de conforter les géants du secteur et leur assurer des revenus toujours croissants ? Ou alors, et cette hypothèse n’entre pas en contradiction avec la première, les municipalités françaises ne seraient-elles pas en passe de tenter de réduire encore plus leurs dépenses et responsabilités en essayant d’imposer à tout un chacun son propre système d’épuration et d’assainissement ?
Quels sont les arguments avancés par les détracteurs de l’usage domestique « sauvage » de l’eau de pluie ?
D’un point de vue sanitaire
Ils avancent l’idée que si la société moderne a réussi le pari de sortir les microbes de la maison, l’eau de pluie c’est les faire rentrer de nouveau. Or une eau non chlorée ni filtrée est une eau qui contient algues, microbes, bactéries et autres micro organismes moyennement pathogènes. L’eau de pluie si elle est un don du ciel, est aussi et surtout chargée de particules de pollution, tout le monde a déjà entendu parler du phénomène des pluies acides qui ravagent certaines forêts. Or si des forêts peuvent être brulées par le simple contact répété avec la pluie, nul n’est à l’abri d’une pollution sanitaire engendrée par une pluie contaminée. Pour parfaire à ce problème il faut donc ajouter à son installation de récupération d’eau de pluie domestique des multi filtres (ozone, UV etc.) pour obtenir une eau stérile et ceci coûte très cher donc tout le monde ne peut y avoir accès.
D’un point de vue économique & social
En France, il faut savoir que nous payons notre assainissement au travers notre consommation d’eau potable. Si on installe un récupérateur d’eau de pluie pour le lave linge et pour d’autres usages domestiques, nous allons moins consommer d’eau potable, donc nous allons moins payer, mais nous allons toujours autant engendrer de pollution, dont nous ne paierons pas le traitement. A partir de là, l’organisme de gestion de vos eaux usées aura toujours autant de traitement à effectuer ( si tant est que vous êtes raccordé au tout à l’égout), mais avec moins de recettes. Que va t-il faire pour augmenter ses recettes ? Il augmentera sa taxe d’assainissement (ou la mairie augmentera les impôts locaux), que tout le monde paiera… Or ceci peut s’avérer socialement injuste puisque les ménages aux revenues modestes ne vont certainement pas pouvoir se payer un récupérateur d’eau de pluie équipé de filtres purificateurs et verront donc non seulement leur facture d’eau augmenter mais s’ils utilisent une eau grise non stérile, verront les risques sanitaires augmenter, contrairement aux familles aux revenus plus importants qui, elles, feront des économies sur la quantité d’eau non consommée.
La solution avancée ?
Il faudrait légiférer de manière claire et mettre en place un système type « compteurs verts » ou une obligation de déclaration clairement affichée pour mettre en place une taxe spécifique, oui encore une, mais une plus grande justice sociale.
De notre côté, nous avons tout de même trouvé un argument fort en faveur de l’usage de l’eau de pluie pour le lave-linge. L’eau de pluie qui contient certes plus de bactéries (sans risque pour la santé) que l’eau potable est au contraire de cette dernière dépourvue de calcaire. C’est une eau douce qui demande moins de lessive pour laver le linge, rend l’adoucissant inutile et augmente la durée de vie de votre machine en évitant de l’entartrer. Il s’agit donc selon nous d’une solution bonne pour le lave-linge, la machine, le linge et ses couleurs ainsi que pour notre planète.
Et vous qu’en pensez-vous ? le débat est ouvert !